Ce village peut nous donner une leçon. Il eut jadis jusqu’à 120 habitants pour 44 aujourd’hui. Une quinzaine de propriétaires venus d’ailleurs ont transformé des appartements anciens et quelques raccards, ou construit de toute pièce leurs maisons et chalets. Certains pourraient penser qu’on assiste à une sorte d’appropriation de nos hameaux. Mais c’est heureux. Je questionne : combien y a-t-il de vaches au village ? Douze pour deux propriétaires qui ne sont sans doute pas paysans à plein temps. Les natifs du lieu aiment leur village, bichonnent leur demeure et aussi leur santé. L’avenir ne nous appartient pas.
Chez-les-Reuses ou Chez-les-Reuse?
En principe les noms propres sont invariables du moins quand ils concernent des prénoms et des noms de familles. Mais la langue spécifique de la vallée d'Entremont comporte au moins une autre exception puisque un village s'appelle Chez-les-Reuses alors que le nom de famille s'écrit Reuse et est normalement invariable comme Chez-les-Addy et Chez-les-Giroud. On trouve parfois Chez-les-Reuse comme sur Wikipedia. Mais à cette date les postes, la commune et les documents géographiques mettent un s au pluriels de Reuse.
Si nous nous référons à la grammaire Grévisse, les noms propres ne prennent pas la marque du pluriel quand ils désignent des familles entières, exemple: Les Dupont sont en voyage. Mais quand ils désignent certaines familles illustres (les Césars, les Stuarts), alors ils prennent un S au pluriel. On peut donc en déduire que si Reuse prend la marque du pluriel alors que Giroud et Addy ne la prennent pas, c'est parce que la famille Reuse est une famille plus illustre que la famille Giroud ou la famille Addy.
On a oublié aujourd'hui pourtant en quoi la famille Reuse se serait illustrée. Ce qui justifierait le flottement sur l'écriture. Mais cette curieuse exception dans la vallée nous permet de nous réserver malgré la grammaire des règles spécifiques à notre région. Gardons le en mémoire.
Le parcours scolaire ...
Il est certainement intéressant, au moment de parler de la diversité des formations proposées actuellement à nos jeunes, d’évoquer aussi la formidable mutation du cursus scolaire et professionnel qui s’est déroulée durant ce dernier siècle. Orsières Info remercie Georgette Gabioud qui a, en toute simplicité, accepté de parler d’un temps où tout était différent. Jugez plutôt !
Georgette Gabioud, pouvez-vous nous retracer votre parcours scolaire?
J’ai suivi toute mon école primaire à Chez-les- Reuse, qui comptait une vingtaine d’élèves pro- venant aussi du village voisin du Bioley. On y entrait vers 5-6-ans, et les filles la quittaient à l’âge de 15 ans. L’école durait 6 mois, du début novembre à la fin avril. Avec peu de congés. En effet, durant la semaine, à part le dimanche bien sûr, seul le jeudi après-midi était libre, et on ne parlait pas de vacances de Noël ou de Pâques. J’ai été à l’école avec deux instituteurs, mais il n’était pas rare qu’on ait à ce moment- là le même enseignant durant toute sa scolarité primaire. C’était le cas de la grande majorité des élèves résidant dans les villages, puisqu’il y avait une école dans presque tous les hameaux de la commune.
Les filles recevaient une formation particulière ?
Surtout au niveau des apprentissages manuels. Durant l’enfance déjà, on nous enseignait à coudre et à tricoter. Deux savoir-faire obligatoires en ce temps, puisque la plupart des vêtements se faisaient à domicile».
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| Classe de 1938 à Chez-Les-Reuses |
Une fois l’école primaire terminée?
Beaucoup entraient alors dans la vie active. Il faut dire qu’alors une famille était un peu comme une petite entreprise. Le papa avait généralement un métier, mais toutes les familles vivaient en partie de l’agriculture. Avec un grand besoin de main d’œuvre pour les foins ou la culture des fraises. D’autres allaient travailler dans les hôtels, durant la saison touristique.
Et vous?
J’ai suivi l’école ménagère à Orsières, de 14 à 16 ans. Si mes souvenirs sont bons, ma classe comptait 18 élèves réparties sur 2 années de programme. L’école se trouvait dans la maison communale actuelle et nous suivions les cours de cuisine à l’hôtel des Alpes, qui disposait alors de 2 cuisines: une pour le commerce et une autre pour notre formation! On nous ren- dait attentives au coût de chaque menu, une manière de nous préparer aux conditions diffi- ciles que connaissaient la plupart des familles à ce moment!
A part la cuisine?
On y apprenait du français et des maths, mais aussi comment tenir un ménage, à raccommo- der, à repasser... C’est une école qui m’a vrai- ment plu, et ce que j’y ai appris m’a beaucoup servi.
Pour rejoindre l’école ménagère?
Chaque matin, je descendais à Orsières à pied, et je remontais toujours à pied une fois l’école terminée. Par tous les temps. Même s’il y avait beaucoup de neige.
Et après?
Mes parents avaient un commerce dans le Val d’Arpettaz, c’est donc tout naturellement que j’ai travaillé au restaurant. La formation des filles était à ce moment-là considérée comme moins nécessaire que celle des garçons. Une des orientations possibles était l’enseignement des travaux manuels. Je n’ai malheureusement pas eu cette chance, l’année où j’ai fini mes classes, aucune formation n’a débuté dans ce domaine. Ensuite, la vie a suivi son cours...
Avec le recul...
J’ai vécu une jeunesse heureuse, je n’ai pas de regret. De plus, les conditions étaient les mêmes pour tous les enfants de familles pay- sannes. Mais j’ai eu la chance de suivre de près les changements intervenus dans la formation, puisque mon mari a fait partie des pionniers qui ont créé à Orsières l’école secondaire! Cette école a apporté une grande amélioration, par- ticulièrement pour les filles! Aujourd’hui, chacun a l’impression que d’entrer en apprentissage ou de faire des études est naturel ! De notre temps, c’était un luxe qu’on aurait tellement souhaité.
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| combe d'orny prassurny biolley chez les reuse |







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